10 juin 2025
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La Question. Qui est Dieu pour un moine ?

Frère Raphaël, 35 ans, est moine cistercien et prêtre à l'abbaye de Sept-Fons depuis quatorze ans. Tous les quinze jours, il répond aux questions d'Olivia Descours sur la vie monastique et spirituelle. Dans cet entretien, il évoque en termes simples sa relation à Dieu et la manière dont celle-ci s'est construite au fil des années.

Question à Frère Raphaël – propos recueillis par Olivia Descours


Source Magazine : Qui est Dieu pour vous ?

Frère Raphaël : C’est une très belle question ! Au début, quand on entre au monastère, on ne sait pas très bien qui est Dieu. On connait Dieu théoriquement. On sait que c’est la sainte Trinité ! On sait surtout que c’est Quelqu’un qui nous a conduit, qui nous a appelé, discrètement il nous a attiré à lui. Quelqu’un qui a mis sur notre route les bonnes personnes. Au commencement, Dieu se révèle à travers des rencontres providentielles qui jalonnent notre chemin.

Puis, petit à petit – cela vient assez lentement mais de manière très sûre – plus on avance dans la vie monastique, plus on apprend à le connaître Lui. Une vraie relation s’instaure. Dans ma journée, j’ai deux interlocuteurs.


S : Concrètement, cette rencontre, qu’est-ce qu’elle change dans votre vie ?

FR : Tout ce qu’on fait – même les choses qui nous plaisent, même celles qui ne nous plaisent pas – on les fait pour lui, parce qu’on veut le suivre. C’est cela qui donne du sens aux choses. Un moine n’a pas qu’une vie de pénitence. Notre vie est pleine de joie authentique. Cette joie, elle n’a de sens, elle n’est pleine, que parce qu’elle est ordonnée dans notre cœur à Dieu.


S : Vous avez évoqué deux interlocuteurs dans votre journée. Je comprends que le premier c’est Jésus. Quel est le deuxième ?

FR : C’est la Vierge Marie. J’ai appris à dire le « Je vous Salue Marie » à dix-huit, dix-neuf ans ! J’avais demandé à quelqu’un de me l’écrire sur un papier car je ne connaissais pas cette prière. Je l’ai apprise par cœur. Mais je n’avais pas de relation particulière avec la Sainte Vierge.

C’est au monastère, pendant mon noviciat, que j’ai noué cette relation de manière un peu volontaire – c’est-à-dire en priant la Sainte Vierge tous les jours. Il s’est créé quelque chose de fort qui structure ma journée. La Vierge Marie est vraiment ma deuxième interlocutrice – mais il n’y a pas de concurrence, c’est indissociable. Elle est indispensable.


S : Beaucoup ont du mal à se rendre compte que Dieu est une personne. Comment faites-vous pour vous approcher de Lui ?

FR : Les joies et les épreuves de la vie peuvent tourner notre cœur vers Dieu, mais cela ne suffit pas toujours à en faire le centre de notre vie. La vie monastique offre un cadre qui aide beaucoup. Je m’explique : sept fois par jour, que j’en aie envie ou non – et très souvent j’ai plein de choses à faire et je n’ai pas envie – je vais à l’église pour l’office. Nous y passons trois ou quatre heures par jour. Cela crée des piliers dans la journée, une structure qui m’aide à l’orienter vers Dieu, quoiqu’il arrive.

Ensuite, nous avons des temps de lecture spirituelle. On lit toutes sortes de livres, mais surtout la Bible, tous les jours un petit peu. Nous avons cette chance de la lire de manière personnelle en entier chaque année. On apprend à devenir familier de tous les personnages de la Bible. La vie du roi David, c’est extraordinaire ! Chaque fois que je retombe dessus, je suis ébloui. C’est l’ami de Dieu par excellence. C’est un bandit, le roi David, il lui arrive plein de choses, il fait des erreurs. C’est exactement nous ! Mais il a une délicatesse par rapport à Dieu, un tact remarquable. Dieu se révèle par touche successive.


S : Donc vous apprenez à connaître Dieu à travers les personnages de la Bible ?

FR : Oui. Jacob, Abraham, Isaac… tous ces personnages deviennent des compagnons de route parce qu’il nous arrive la même chose, parce qu’on apprend à connaître Dieu comme eux, dans une certaine obscurité et une certaine clarté. Toute la Bible dit Dieu et converge vers Jésus.

C’est une espèce de familiarité qui se développe. On apprend aussi à connaître Dieu en passant du temps devant le tabernacle, en silence. Le plus important, c’est de passer du temps avec quelqu’un – comme dans n’importe quelle relation humaine, on va chercher des occasions pour être ensemble.

Connaître Dieu c’est aussi regarder en arrière dans sa vie et voir tout le chemin parcouru. On s’aperçoit qu’il nous a conduit jusqu’ici tout au long du chemin. On a le cœur qui brûle. Il faut apprendre à rendre grâce. Rendre grâce pour le bien mais aussi pour le mal. C’est un moyen très sûr pour découvrir le visage de Dieu. Car il s’occupe de nous.


« Plus on avance dans la vie monastique, plus on apprend à connaître Quelqu’un. Et ce Quelqu’un va devenir notre ami, notre interlocuteur privilégié de toute la journée. »

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